L’argent de Dieu

Chapitre 1
Le Régisseur Hindou

Dasamamsha signifie littéralement en sanskrit «un dixième»; son équivalent français est «la dîme». La pratique de dasamamsha consiste à donner, ou rendre, à Dieu un dixième de tous ses revenus afin de perpétuer le travail qui se fait en son nom sur notre planète. Cette pratique est aussi ancienne que l'hindouisme même, et figure parmi les plus anciens principes moraux, les yama et les niyama (restrictions et pratiques hindoues). Il y a des millénaires, le fidèle offrait à son temple un dixième de sa récolte de riz, deux noix de cocos sur vingt, et trois bananes pour une grappe de trente.

Pour comprendre l'effet de cette pratique sur l'état de conscience du donneur, considérons trois éléments de la vie: le bonheur, la santé, la puissance. L'un des grands principes de la sagesse est que le don généreux de soi et de ses biens produit un bonheur profond chez celui qui donne. On sait bien que la joie de donner est bien plus profonde et satisfaisante que celle d'acquérir.

Voici un témoignage que nous avons reçu, un jour, de la part du jeune propriétaire d'une modeste entreprise: «Depuis notre mariage nous respectons la pratique de dasamamsha, et nous sommes convaincus que ce que nous donnons nous profite indirectement encore plus que la portion que nous gardons. Les résultats sont évidents: on s'accorde bien tous les quatre, l'affaire marche à merveille, et on se sent très proche de Dieu et des dieux...» Nous recevons ce genre de témoignage journellement dans nos bureaux. Qu'il s'agisse d'une personne jeune, âgée, quelle que soit sa profession, degré de richesse, ou niveau social, la conclusion est presque toujours la même: dasamamsha crée un bonheur profond.

Deuxième élément de la vie que nous voulons considérer: la santé. Allons-nous prétendre au miracle? On le pourrait bien, car nous avons reçu de nombreux témoignages à cet effet. Mais il y a aussi une explication naturelle. On sait bien que l'argent est la raison principale du stress, de l'angoisse, de l'autocritique, du surmenage, et de la crispation générale que s'infligent la plupart de nos contemporains. Du point de vue de notre religion et de sa connaissance yogine, le résultat est evident: les pranas subtiles qui préservent la santé et le bien être sont deroutés, et la maladie s'installe. Mais, que se passe-t-il si, au milieu de cette situation malheureuse, on se met à pratiquer dasamamsha? C'est la détente générale. Le soucis économique s'envole loin de nous, remplacé par son contraire--la confiance--qui provient de la conviction profonde que nous avons fait très bien, que nous avons contribué au travail des dieux, et qu'ils ne manqueront pas de veiller sur nous--un soulagement psychologique qu'on imaginerait difficilement par un autre moyen. Les courants subtils retrouvent leur équilibre, et la santé revient. Ça peut bien paraître miraculeux, surtout pour celui qui éprouvre ce retour.

Les soucis d'argent

Chez de nombreuses familles hindoues, c'est une lutte interminable contre les soucis d'argent. Dans une telle ambiance, la vie religieuse ou spirituelle a bien du mal à se manifester, et les querelles se multiplient. Les aînés et conseillers de nos communautés savent bien que ce sont les problèmes financiers qui, le plus souvent, éprouvent les émotions et menacent la stabilité du foyer, et que ce sont eux encore qui engendrent les troubles nerveux et les angoisses qui, eux, se manifestent tôt ou tard en de divers malaises physiques.

Il n'est pas difficile de concevoir comment la pratique de dasamamsha apporte le soulagement. Donner la dîme, c'est s'engager à croire vraiment que Dieu est présent et actif dans notre univers, et qu'il déverse constamment ses bénédictions sur ses enfants.

Le matérialiste, lui, peut bien agir comme si Dieu n'existait pas. Pour lui, le problème de finance ne peut se résoudre que par la finance. Si l'argent fait défaut, ou menace de le faire, l'unique solution possible est d'acquérir ou épargner davantage. Et si la chose est difficile, la tension augmente. S'étant aliéné d'avance de tout recours autre que celui du portefeuille, il ne se permet pas d'espérer en une providence divine qui pourrait le guider et réduire l'angoisse. N'admettant pas l'influence d'une force plus qu'humaine dans ses affaires personnelles, il se contreint à vivre dans un espace psychologique douloureusement étroit.

L'affirmation de la foi

Donner la dîme, c'est affirmer notre foi en le Sanatana-dharma. C'est investir une partie de soi-même dans la croyance que Dieu et les dieux existent et qu'ils sont des dieux d'amour. C'est s'engager à croire, et se rappeler à intervalles réguliers que, en tant qu'êtres humains, nous n'avons pas toujours à ne compter que sur notre force et nos ressources personnelles pour résoudre nos problèmes. Nous n'avons pas à nous limiter qu'à ce que nous croyons immédiatement possible. Donner la dîme, c'est se donner l'occasion de prendre souvent conscience de la puissance extrahumaine qui nous est toujours disponible.

Lorsqu'on se rend receptif à cette aide extrapersonnelle, elle peut se manifester dans notre vie de diverses manières. Nous avons reçu le témoignage d'un couple qui avait vécu une vie aisée jusqu'à un certain âge, et firent un jour leur dasama bhaga vrata (voeu solennel de donner désormais la dîme) pour aider un temple à se construire. La communaute fut la première à remarquer un changement dans ce couple: ils paraissaient maintenant bien joyeux. Un jour, l'époux témoigna du nouveau bonheur qu'il partageait avec sa femme. Chose curieuse, expliquait-il: sa femme qui était tourmentée de rhumatisme depuis longtemps se trouvait inexplicablement soulagée depuis quelque temps, et en fait, la maladie avait maintenant presque disparu.

Cette femme s'était simplement ouverte à l'influence et à la puissance transformatrice divine. Elle avait toujours cru en Dieu, mais se mettant à pratiquer dasamamsha, cela fit qu'elle invoqua Dieu, bien qu'inconsciemment, à participer à sa vie, en participant, elle, à son oeuvre, en aidant a ouvrir les lignes de communication entre lui et ses dévots (en aidant le temple à s'établir). Ainsi l'énergie cosmique de Dieu passait à travers sa personne, et eut l'effet d'une puissance de guérison qui peu à peu soulagea sa souffrance, et ouvrit ses courants nerveux, praniques et subtiles qui étaient jusqu'alors, et pour une raison ou une autre, bloqués.

La générosité donne la puissance

Le troisième élément de la vie que nous allons considérer par rapport à la pratique de dasamamsha, c'est la puissance. Nous avons déjà vu plus haut que donner la dîme, c'est ouvrir une porte en soi par laquelle la puissance divine, la shakti, peut entrer dans notre vie et stimuler la joie, créer l'abondance, et rétablir la santé.

Pour être imprégné de shakti et connaître directement par l'expérience les principes éternels, nos motifs doivent être épurés d'égoïsme. Shakti, c'est la force divine, la puissance à Dieu à rendre manifeste, à créer. C'est son amour en action. Vraiment, quel privilège que d'avoir à notre disposition une pratique telle que dasamamsha qui nous fait affirmer notre croyance en un Dieu créateur et plein d'amour.

Bien que notre objectif, en donnant la dîme, ne soit pas de chercher la récompense, tout de même cette pratique apporte des bienfaits personnels, spirituels et matériels. Mais le plus souvent la bénédiction est en forme d'une shakti subtile qui nous pénètre, sans peut-être qu'on s'en apperçoive, au premier abord. Mais à la longue on remarque une transformation--une amélioration dans nos rapports humains, peut-être, nos prochains semblant prendre davantage de plaisir en notre compagnie depuis quelque temps. Ou bien nos culpabilités d'autrefois auront perdu de leur amertume. Ou encore, ce qui nous menaçait hier paraît aujourd'hui moins impressionant. Nos états d'esprits sont plus qu'auparavant imprégnés d'un sens d'amour universel, et de confiance. Nous avons l'impression que l'abondance, et non seulement matérielle, est à notre la portée de notre main.

Le régisseur hindou

La pratique de dasamamsha découle d'un vaste principe qui est celui de «l'intendance» ou de la «régie» hindoue. Et ce principe se base sur trois concepts philosophiques, ou croyances fondamentales, selon lesquels:

1) Dieu est en même temps le Créateur et la Création entière, et qu'il est donc le véritable et ultime propriétaire de tout ce qui existe,
2) chaque Hindou est le régisseur de tout ce que Dieu lui a confié, et
3) selon la loi du karma, chacun devra rendre compte de la façon dont il s'est acquitté de cette responsabilité.

Nous voyons donc que le concept du don de la dîme débouche sur un champ bien plus large que celui des simples finances. Car Dieu nous confie non seulement des ressources pécunières, mais aussi une certaine quantité de temps à bien régir, des talents, une certaine quantité de «vie», d'énergie vitale, et nombre d'occasions de faire notre empreinte sur cette Terre. De nombreux donneurs de la dîme ont pris conscience de ces rapports, s'en sont inspirés, et ont senti le besoin urgent de dédier leur temps, leurs talents, et leurs vies à Dieu et son oeuvre.

Celui qui donne la dîme et comprend le précedent, pourra donc prendre joie à penser que non seulement il donne, ou rend, les 10% de ses revenus à Dieu, mais qu'en fait les autres 90% qu'il garde sont également d'origine divine et dignes de reverence. Et il ne s'arrête plus non plus à l'idée que ce n'est qu'une seule petite partie de lui-même, représentée par l'argent qu'il gagne, qui soit sacrée. Ce sont donc tous ses biens et toute sa vie qui se trouvent, à ses yeux, divinisés.

Beaucoup--même des enfants--offrent régulièrement les 10% de leurs revenus à l'un ou l'autre des fonds de l'Hindu Heritage Endowment. Pensez-vous que ce geste leur apporte beaucoup? Essayez pour six mois et voyez les joyeuses transformations qui se manifestent en vous. Une fois que vous êtes décidé, soyez constant jusqu'au terme. Vous n'aurez jamais été à un tel point maître de vos finances et de votre vie. Ce ne seront plus eux qui vous maîtrisent. Si 10 % est trop pour vous, engagez-vous formellement à donner une moindre somme chaque mois. Vous pouvez contribuer à un fond déjà établi, ou à un nouveau que vous aurez établi vous-même--en faveur d'un temple, ashram, orphelinat ou autre institution. Ce fond sera un perpétuel don que vous aurez fait à Dieu, qui vivra longtemps--même après votre passage dans l'autre monde. Et, une fois que vous y vivrez, dans cet autre monde, vous serez enrichi de voir le bien qu'a produit votre passage sur terre.